Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le développement économique et technologique du monde a été fulgurant, dépassant même l’imagination de Jules Verne qui s’interrogeait déjà, dans Vingt mille lieues sous les mers, sur le décalage entre le niveau très bas de la sagesse humaine et le niveau très élevé de ses capacités d’invention qui pourraient être utilisées contre elle-même à la manière de L’apprenti sorcier de Paul Dukas.

La nature s’est souvent rappelée au bon souvenir des humains, avec un malus lié à une excitation extrême due à leur activité. Les dernières catastrophes (tremblement de terre au Maroc et inondations en Libye) illustrent bien la situation.

Valoriser la solidarité

Dans le premier cas, l’aménagement du territoire, tel qu’il est majoritairement défaillant, dans les régions secouées par les chocs de la tectonique des plaques, fait toujours de gros dégâts. Dans le second, l’accélération des tensions météorologiques liées au changement climatique met en évidence les mêmes défaillances. Mais il ne suffit pas de s’alarmer, de constater, de tenter de freiner le dérèglement climatique. Il faut aussi mettre en place des structures adaptées pour aider les victimes et créer les conditions d’une prévention pour l’avenir.

Nous avons pour cela plusieurs outils existants. Les instances de l’ONU dédiées à la solidarité internationale, le travail des ONG et des grandes associations de solidarité. Restent les 195 États dans un monde où les tensions entre nations ne font que s’accentuer sous la houlette des 20 plus puissantes avec des guerres régionales qui constituent aussi des catastrophes, comme on l’a vu en Ukraine avec la destruction du barrage de Nova Kakhovka.

Ne serait-il pas souhaitable d’obliger les État à travailler ensemble, dans le cadre d’une organisation internationale, comme il en existe une avec l’OIT pour le travail, pour que dans chaque pays soit imaginée une structure d’opération et d’accueil ciblant les catastrophes qui, pour certaines, sont prévisibles, et pour d’autres aléatoires ?

Ce travail est déjà en cours, mais trop éparpillé et sans relais suffisants pour que l’efficacité l’emporte. Reste aussi la canalisation vertueuse des aides citoyennes qui, souvent, sont trop liées à la subjectivité des États et des médias qui les soutiennent ou sont parfois déviées de leur but. Pourquoi ne pas créer une structure européenne d’intervention rapide permettant de mutualiser les moyens en matériel, comme les canadairs par exemple, et en pompiers permettant des interventions rapides et efficaces ?

Dépasser la peur

La culture des peurs, même si elle peut se comprendre, n’apporte rien de bon parce que, contrairement à ce qu’elle affiche en apparence, elle pousse les peuples au repli et au chacun pour soi avec une logique où les riches sont appelés à secourir les pauvres sans que rien ne change pour l’avenir. Plus encore, elle freine les capacités d’imagination liées à la recherche fondamentale et appliquée qui peuvent apporter des solutions nouvelles au traitement des catastrophes et faire gagner du temps. Le temps est la mesure la plus fiable pour juger de la capacité à régler une situation de crise. Prenons pour exemple les drones en vogue actuellement. On sait les utiliser pour faire exploser des charges meurtrières dans les guerres, mais on ne les utilise pas ou si peu pour secourir celles et ceux qui, dans l’isolement d’une catastrophe, se retrouvent démunis.

Vu la vitesse à laquelle, aujourd’hui, les inventions bousculent l’actualité scientifique, il faut peser pour qu’elles soient utilisées pour la solidarité en priorité. Dans ce contexte, la Cgt a une belle histoire solidaire. Elle a prouvé, depuis qu’elle existe, qu’elle apporte toute l’énergie nécessaire pour que le monde soit moins laid, sans pour autant avoir la prétention de pouvoir tout régler.

Yvon Huet